Soumis à une charge de travail énorme dans un contexte social plus que tendu, de nombreux fonctionnaires luttent pour poursuivre leur travail sans craquer. C’est notamment le cas de Jean-Michel, gradé dans la police stéphanoise qui avoue être « épuisé ». « Je me dois de tenir pour nous, mais aussi pour vous, car si nous n’avons plus de police, c’est l’anarchie », avoue-t-il.
Pour lui, la situation s’est réellement détériorée depuis 2015. « On a vécu des choses que l’on n’avait pas connues même en 20 ou 25 ans de police. Le degré de violence sur Saint-Etienne a atteint un niveau que l’on n’avait jamais vu auparavant, on est réellement devenus des cibles ». Si aucun suicide ne s’est pour le moment produit dans le département, Jean-Michel reste sur ses gardes. « Il faut être prudent, et plus s’ouvrir aux autres en cas de mal-être ».
Notre rédaction est allée à la rencontre de Sylvia Vaudou, secrétaire départementale d’Alliance Police nationale dans la Loire.
Peut-on qualifié la situation actuelle de dramatique ?
« Oui c’est dramatique, car nous avons 28 collègues qui se sont donné la mort. En si peu de temps, le nombre est énorme, cela n’avait jamais été le cas auparavant. Aujourd’hui, on peut voir que les collègues sont usés, fatigués. Avec tout ce qui leur est demandé, ils n’ont plus de temps de repos er sont à bout de souffle et il va vraiment falloir prendre des mesures. Le fait que certains en arrivent à se donner la mort est extrêmement horrible pour notre profession. »Quel type de mesure a pu être instauré pour aider les policiers ?
« Sur la DDSP de la Loire, une cellule psychologique a été mise en place. Nous n’avons pas eu de cas de suicide dans le département, peut-être grâce à cette dernière. Mais il faut que les collègues comprennent également qu’ils doivent aller voir des psychologues et que notre hiérarchie mette aussi en place un système plus automatique. A chaque fois qu’il y a un problème lors d’une intervention compliquée, il faut que les policiers puissent aller voir un psychologue. Cela est fait dans les hôpitaux ou pour les pompiers, chez nous cela ne se fait pas assez. On pense que le policier a une carapace liée à son statut et qu’il peut tout absorber. Cela n’est pas vrai, comme le montrent les 28 suicides depuis le début de l’année. »Comment fonctionne cette cellule psychologique ?
« C’est une cellule que l’on a mis en place avec un psychologue qui peut intervenir à tout moment. Mais très peu de collègues demandent cette intervention car c’est toujours un peu mal vu. On estime que la personne va être fragilisée alors qu’on a un travail où on nous demande d’être forts. En réalité, il n’y a aucune raison pour que cela ne soit pas fait automatiquement au sein de la police. »Quel est le nombre de policiers ligériens qui ont déjà fait appel à cette cellule psychologique ?
« A Saint-Etienne, très peu, peut-être un ou deux collègues. Malgré tout, ils savent qu’elle existe et je pense que le fait de savoir qu’on puisse être aidé à tout moment nous a fait éviter le pire. Notre hiérarchie doit inciter et prendre en charge les personnes qui doivent être suivies par un psychologue. Petit à petit il va falloir que cela devienne systématique. Il est important de faire un débriefing de groupe après chaque grosse intervention pour que tout le monde explique son ressenti même si ce n’est pas dans les mœurs. »
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